Ianchelevici
Ianchelevici (1909-1994) était homme de petite taille, mais il lui arrivait de façonner des géants. Le grand sculpteur belgo-roumain, c’est vrai, avait un sens inné du monumental. « Pour épuiser son sens et porter témoignage du génie humain », me disait-il, « une statue en plein air doit être de grande taille car la nature environnante se charge déjà d’en manger la moitié. » Le Plongeur, réalisé en 1939 à Liège, est haut de deux mètres cinquante ; L’Appel (1939), à La Louvière, atteint quatre mètres et Le Verbe (1955), à Sint-Niklaas, cinq mètres. Pour ne citer que trois exemples… Ces sculptures impressionnent par leur taille, mais aussi par la force qui en émane : ce n’est pas pour rien que Julien de Borman et Sébastien Willemyns (Flygmaskin) y ont puisé une part de leur inspiration.
La création musicale, dont on va découvrir ici les meilleurs morceaux, fera date elle aussi. Si les deux musiciens ont été touchés par ce besoin sauvage – et parfois orgueilleux – qu’avait Ianchelevici de commémorer en grand l’événement collectif, ils n’ont pas été insensibles non plus à cette flamme que le sculpteur a fait naître en eux grâce à l’impressionnante série d’œuvres de moindres tailles, rassemblée depuis 1987 au Mill – le Musée Ianchelevici de La Louvière. Car c’est là, en déambulant des heures durant parmi ces magnifiques sculptures, qu’ils ont conçu leur musique et en ont extrait les rythmes les plus explicites. Mettre en résonance ces deux modes d’expressions artistiques que sont la sculpture et la musique, voilà bien un pari esthétique hors du commun que n’aurait pas désavoué Ian. Pari tenu, pari réussi. Cela nous permet aujourd’hui d’écouter les étonnantes interactions qui peuvent naître, avec bonheur, entre l’harmonieuse immatérialité des sons et l’expressivité des formes sculptées, entre le violon alto ou l’accordéon diatonique des musiciens et le burin du sculpteur.
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